Etre petit c’est être sans armes. Les parents décident tout à notre place. Peu leur importent le désespoir et les larmes. On suit toujours son père quand celui-ci se déplace. Moi, je tremble tout entier et mon sang se glace A chaque fois que je repense à l’inoubliable Hédia. Il y a longtemps, j’ai quitté Tunis et perdu sa trace. Et, si je souffre, c’est parce qu’elle me répudia. Et, si je souffre, c’est parce qu’en pensant à elle Je me remémore un temps heureux mais à jamais perdu. Dans mes souvenirs il y a une douceur tantôt éperdue, Tantôt emplie d’une injustice indifférente et cruelle. Le temps a hélas passé ; les années se sont succédées, Mais je ne voie pas les prémices de la rémission Tant espérée par mon cœur qui m’a encore demandé Si nous allions bientôt avoir enfin la permission De vivre sans plus jamais regarder derrière nous ; Sans plus jamais pleurer ni sur tous nos espoirs déçus, Ni sur cet immense et probable bonheur entraperçu. Puisque le passé et le présent jamais ne renouent, Je demeurerai obsédé par le vert des yeux de ma belle. Je demeurerai jusqu’à ma mort, l’esprit et le cœur rebelles Aux décisions facétieuses et définitives prises par le destin Un jour, mon trop plein de chagrin deviendra volcan Et je ferai de mon désir de vengeance un énorme boucan. Quant à ma haine et à ma rancœur, elles feront mon festin. Je jure que mes regrets demeureront immarcescibles Même si je brûle pour une richesse inaccessible.