Je n'aurai pas connu l'éveil d'un coeur timide, Premier dérèglement de l'horloge d'amour, Son joyeux carillon, son aiguille perfide Qui bousculent l'enfance et sa paix sans détour.
Le rose aux joues, les coups dans la poitrine, Le souffle qui s'affole, un sourire hésitant Devant la première tendresse qui chemine Pour troubler les coeurs fragiles de quinze ans.
J'aurais voulu goûter les plaisirs innocents Des premières amours, du baiser que l'on risque Et garder sur la joue le souvenir brûlant D'un candide bonheur que trop tôt l'on confisque
Et puis glisser ma main dans une main tremblante, Avoir au bord des lèvres un je t'aime impatient, Le retenir encore et frémir dans l'attente Qu'il ose enfin jaillir sur un ton vacillant.
Les billets chiffonnés qu'on couvre de baisers, Lus cent fois, cent fois nouveaux à des yeux inlassables, Les sonnets maladroits en hâte composés, Je n'ai jusqu'à présent rien connu de semblable
Et n'en connaîtrai rien puisque l'heure est venue Où s'éloigne l'enfance et un âge nouveau Frappe au seuil de mon coeur le laissant vide et nu De ces amours en herbe et de leur clair flambeau.