Et je pense au bonheur comme on pense au printemps, Il reviendra, c'est sûr, si charmant et timide, Avec ses oisillons qui posent, hésitants, Leurs pattes sur la pierre ou le gazon humide.
Et je pense au bonheur comme on pense à l'abeille, Posée sur tant de fleurs aux corolles divines, Elle donne chaque année aux calices leur miel, Dans le parfum léger des bouquets d'églantines.
Et je pense au bonheur comme on pense aux grands bois Verts, touffus, où jamais le concert ne s'achève, Car, guidés par le vent, mille archets à la fois Susurrent aux rameaux leur chanson et leur rêve.
Et je pense au bonheur comme on pense aux fontaines Où l'onde est claire et pure et semée de diamants Entendrai-je à nouveau la si fraîche rengaine De l'eau sur les cailloux au gai soleil levant.
Et je pense au bonheur comme on pense aux couleurs De tous ces papillons aux mantelets de soie, Ils vont et viennent, heureux, en ballets de douceur... A guetter leur retour, c'est déjà de la joie.
Et je pense au bonheur qui serait toi et moi : Je m'en vais te revoir, t'approcher, t'embrasser... Le bonheur est, vois-tu, si fragile ici-bas : Sur terre, comme il est dit, on ne fait que passer.