Ce matin un soleil fuse en haut du coteau Dans les vignes, sur son flanc, à travers son manteau Un rayon cristallin, crachat de taste-vin Sur la verte litière noircie de jolis grains
La machine ne vient pas sur ce tènement haut Les porteurs, les coupeurs sont prêts pour la récolte La benne a remplacé l’antique tombereau Qui pliait en suant sous le poids des comportes
Lorsque le jour envoie ses flèches arrogantes Les glaneuses s’élancent ainsi que des Bacchantes Pour ôter sans scrupule les opulentes grappes Sous le cep indigné qui tremble et qui se drape
Elles plaisantent et spéculent, usant d’un ton badin Des bouches écarlates aussi rouges que leurs mains Elles laissent leur jeunesse déborder de merveilles Comme des coquelicots ouverts jusqu’aux oreilles
Ces adorables mains tailleuses de l’Automne Emplissent les seaux noirs posés dans la colonne Veillées par le mousseigne qui donne la cadence Se courbant sur les grappes avec beaucoup d’aisance
Tout le ciel est nimbé d'une clarté vermeil Est-ce le sang du raisin qu’appelle le soleil ? Peut-être couronne-t-il Bacchus et tous les dieux Comme un divin témoin de la faveur des cieux
Que j'aime à contempler ces collines verdâtres Qui ondulent plaisamment en grands amphithéâtres Qu’il m’est doux d’admirer ces vignes renommées Qui recourbent en festons, les merlots, gabernets Tandis que vers le nord, l’église, le clocher vert S’apprêtent en soupirant à affronter l’hiver.