Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Martin DOWLE

Les ruines

Un soir, loin du temps et de son horloge précis,
Je m’arrêtai dans un lieu de majestueux vestiges
Où des ruines se lamentaient, revendiquant le prestige,
Du glorieux passé d’un Royaume, terre d’oubli.
Les pierres se pâmaient en un sourd râle jouissif.
Et le silence glissait sur des stèles renversées,
Puis figé se baignait dans la lointaine clarté
Qu’un soleil pompait vers les rochers plaintifs.
Chaque recoin, chaque angle fut scruté de ses rais,
Ambassadeurs d’un astre autrefois puissant et riche.
Ce fut l’écho sordide d’une étoile en friche
Qui croyait là rejoindre une terre civilisée.
Mais il n’y avait pour accueil qu’un poète sans ambition...
Si ce n’est celle de contempler, extasié, l’immense beauté,
De la voûte étincelante aux mille lueurs bercées,
Ecoutant les ruines pleurant, maudissant leur perdition.

« Las, jadis glorieuse, ma terre portait la gloire,
D’un Roi et de Rois qui des royaumes édifiaient.
Il ne reste que le squelette d’un passé d’antiques fiertés,
Pour t’accueillir indignement, Ô astre porteur d’espoir. »
« Ah l’époque héroïque quand mes belles pierres naquirent !
Je fus alors palais, château et temple païen.
Mais des feux ravageurs me ravagèrent, sombres assassins !
Ces feux qui embrassent la vie et embrasent les empires. »
« Ô Reine des nuits qui a contemplé autant de fois,
Mes ancêtres me bâtir d’empires aux cent ponts,
Puis unir, puis détruire, pour renaître comme les saisons,
Souviens-toi, témoin nocturne, souviens-toi du jour des
Rois ! »

Mais l’étoile, soleil âgé, s’éclipsait pour mourir.
Les siècles qui ont coulés avant qu’elle ne parvienne
A heurter de sa lumière la terre et son domaine
L’ont épuisée. Et sans souffrir elle s’éteignait en un
Soupir.

« Avec puissance et gloire j’ai arrosé l’espace,
Transcendant chaque ténèbre d’une joyeuse passion.
Rayons dansants perçaient récifs, constellations !
J’éclairais aux comètes l’éclaboussure de leurs traces. »
« Oui Terre, arrogante, je me croyais immortelle !
Mais les abîmes sans frontières ont absorbé mes ondes,
Ont congelé mes chaleurs si généreuses et fécondes,
Pour au temps me sacrifier sur son brûlant autel. »
« Autrefois glorieux foyer de feux en fleurs...
Mais englouti en cette nuit tel un martyre immolé,
Comme ce ver insignifiant qui sans bruit s’est consumé,
Qui se terre dans les herbes et que personne ne pleure. »

Mais le temps me réveilla et me repris ses droits.
Et dans l’univers lointain une étoile renaissait,
Et le règne d’un nouveau roi tout doucement s’amorçait
Faisant oublier ensemble les clameurs des autrefois.
Si je vivais encore, après cette nuit, en cette aurore
Je sus qu’éphémère mes heures étaient comptés.
Que tels les astres et les royaumes l’abîme m’engloutirait
M’effaçant tel l’homme qui durant ce rêve est mort.

Cergy, février 1998