La fragilité d'une aube rougissante Vient caresser la nuit qui se dissout. Émergeant de son voile d'arabesques brumeuses L'île s'éveille doucement aux promesses du jour. Un vent timide porte le vol discret des oiseaux À travers la marée ondulante des blés en croissance. Et je marche en silence près du fossé sauvage Foulant de mes pieds nus des perles de rosée. J'avance lentement, savourant ces minutes de grâce Où le paysage d'une pureté touchante Vient poser sa troublante beauté sur le bord de l'âme. Fredonnant sa chanson, fidèle à sa mémoire J'imagine Félix en compagnie de son petit bonheur; Félix dont la voix criait haut et fort l'amour de sa terre Qui osait nous montrer le vrai chemin du cœur. Félix, le poète qui chantait les beautés de son île Comme un amoureux parlerait de la femme qu'il aime. Soudain au bord du fossé et n'osant pas y croire Au milieu des cailloux tapissés de broussaille Je devine une présence, j'aperçois un visage; Oui, c'est lui, c'est le petit bonheur Il est là, je le vois et il n'est plus en pleurs, Mais semble me sourire sous les traits d'une précieuse fleur