Obstinément vouloir imprimer sur la page Le présent fugitif et toujours dépassé Pour sauver de l'oubli –dérisoire mirage Ces fragments que chaque seconde a entassés.
Je n'aurais rien vécu si je ne l'ai écrit Gravé comme une ride du corps sur l'esprit : Comme l'arbre étendant ses cercles concentriques, Ainsi ce que je vis avec les mots s'imbrique.
Et qu’écrirai-je d'autre que des états d'âme Le Réel, on le voit, il est là, on le vit Mais les mots intérieurs, ce flux comme une lame Acharnée taraudant l'esprit inassouvi...
Toute rumeur du monde en moi se fait miroir, Je n'aurai rien vécu que je n'aie ressenti Puis déposé tout vif au creux de ma mémoire Que chaque instant passé comble et appesantit.
Jamais ne suis-je plus moi-même qu'étant seule Libre du piège des paroles échangées Et de moi n'étant dupe ni voulant changer Tout entière livrée à capter l'étincelle Où je verrai briller, lumineux et intenses, Les secrets murmurants émanés du silence.