Un jour j’étais Poète et les mots me parlaient. Je regardais l’étoile au dedans de ma tête Et tout était si clair, et tout se révélait… Maintenant, les ténèbres… la parole est muette.
Un jour j’étais Poète… Je ou l’Autre, peut-être… Les mots coloriés tendaient leurs phrases offertes, Le monde entier passait auprès de ma fenêtre Et je le saisissais de mes deux mains ouvertes.
Je pénétrais la trame des mots que je tissais En impalpable fresque aux fils de harpe et eau Où j’écoutais chanter les nuages… qui sait… J’ai cisaillé les cordes de mon écheveau.
Oui ! Alliant la frêle harmonie des voyelles Aux sons pleins et profonds des plus riches consonnes, J’avais capté le chant de l’âme originelle Et déchiffré sa voix que n’entendait personne…
J’éclaboussais mes mots d’odeurs, de bruits, d’images Qui condensaient leur goût multiple en un seul sens… Mage, je détenais le prodigieux langage De l’Univers cristallisé dans mes essences…
Un jour J’ai vu le jour tel qu’il est : Quotidien. Un jour J’ai vu le monde comme il est : Ancien.
Mes yeux se sont fermés à l’au-delà des choses. Ma parole a tari son inutile glose. Puis j’ai soufflé l’étoile consumant l’absence Et j’ai éteint mes mots. Le noir et le silence.