Isolément, je suis en mon chemin posté : Suis-je inquiété, seul et désespéré Le soir dans mon chez moi quand la nuit est tombée? Ça sent les chants troublés et la terre mouillée,
D'inutiles sonnets qui sonnent dans le vide, Déambulants et trébuchants dans les soirs bleus ; Ça sent l'enfant perdu retrouvé peu à peu Et puis enfin ça sent le totem impavide
Qui chassait le matin dans les bois près de moi, Qui chassait son passé dans la vie avec moi ; Moi assis dans la neige (à faux trône faux roi), Lui courant, cherchant et moi crevant de froid ;
J'ai bien souvent senti mes sourcils sourciller Au faîte du grand pin ou ma vie a passé, Et mes oreilles hurler et mes yeux pleurer Alors que peu à peu mes traits se fondaient
En d'autres moins flatteurs ; mes pieds ont piétiné Dans les flocons de joie, et mon sang veillissant Prit la couleur rougée qu'habituellement Au fil du temps prennent les humeurs déversées
Dans ma forêt sacrée ; ça sent l'échappée belle : Derrière moi s'étendait la lande brumée Et proie des chiens de proie en riant je fuyais Et la terre défilait comme un rêve frêle ;
Ça sentait l'enfant du diable, l'enfant maudit, Je, gamin ou fou que j'étais, m'étais caché Au creux du pin, grand et chaud, lui qui accueillait En son sein de géant tant d'enfants là blottis ;
Réfugié hors du temps, allant au fil des vents, Patient dans les bois, dans un aulne ou un chêne, J'attends ceux égarés, marchant entre les frênes Qui, sur un blanc cheval, m'apercevaient enfants.