Le fouette-queue semblait garder jalousement Ce caillou qui brillait parmi les autres si insignifiants Dans ce erg de Harmacoum. En m’approchant de lui, attiré par sa beauté, Je perçu un léger bruit provenant de l’intérieur !
La voix semblait plus douce que le vent Mais si imprécise que l’on pouvait à peine l’entendre ! ”verse un peu d’eau sur moi, oui, ce caillou devant toi”...
Surpris ! et curieux à la fois... J’avais entendu à Chinguetti, les chameliers Qui disaient que certains cailloux du désert Parlaient quand ils avaient trop chaud Et qu’il fallait ne pas trop s’en approcher !
Ma gourde étant encore pleine, Je me risquais d’en verser quelques larmes Sur ce caillou bavard ! Soudain, l’éclair qui m’encercla l’espace d’un instant Se transforma en une fée nomade !
Son mellafah brillait de mille étincelles d’argent... Son visage sous ce voile d’étoiles transparentes Laissait deviner un visage d’ange !
Elle jeta un regard de connivence sur moi Et me dit dans un dialecte que je découvris ”merci, tu viens de me libérer de mille ans de vie De caillou parce que jadis J’avais aimé un homme interdit”
Surpris mais en même temps fier de mon acte Pour avoir libéré cette fée, je lui pris la main Pour l’aider à parcourir les quelques mètres Qu’il restait à franchir pour atteindre enfin la piste.
Elle cherchait parfois ses mots et ses gestes, Elle tenta de me remercier en me prenant par la main Pour m’attirer de nouveau vers le désert de cailloux !
Je compris trop tard que j’allais vers une seule nuit d’éter Au petit matin !
Aujourd’hui, je vois passer des caravanes sans espoir De retenir un seul chamelier ou une mauresse, Qui traversent ce désert parce qu’elle me jeta Bien trop loin de la piste pour être entendu...
Je suis là, dans ce désert par la ruse de cette fée Envoûtante depuis bientôt deux mille ans Alors que je ne devais y rester que quelques jours !
Que fait-elle maintenant qu’elle n’est plus ce caillou ?
Désert de Harmacoum - Mauritanie Mercredi 10 mars 2004 - 11 h 30