J’ai coulé tant de jours sur le bord de tes rives, Tant goûté tes attraits, la touffeur de tes flots, Que je m’ennuie de toi, Ô ma belle captive ; Rien ne reste de toi que la douceur des mots.
Tu naquis de trois sources, par la lauze cendreuse, Sous les nues éthérées de la Sainte-Eulalie, Ruisselet famélique, ta voix impétueuse Enfla jusqu’à couvrir les confins du Berry.
Tu cascades en la plaine, dans le pays d’Astrée, Et saillis par-dessus le purpurin porphyre, Pour filer vers la mer, gazelle empressée, Caressée mollement par les lascifs zéphyrs.
Tu folâtres, féline, de Touraine en Anjou, Pour peindre sur tes eaux la splendeur des châteaux, Qui laissent, en se mirant, un baiser sur ta joue, Et pleurent, nostalgiques, leurs souvenirs royaux.
Tu te meurs dans des fanges, épuisée mais superbe, A l’heure où le reflux va briser ton élan, Dans un dernier sursaut, tu rejaillis en gerbes, Avant de succomber dans un cri déchirant.
