Taquiné par la brise un roseau se dandine ; Emu par sa douceur et sa légèreté, Un flâneur du dimanche, d'un grand chapeau coiffé, S'approche à pas menus de l'étang qui ondine.
La flatterie de l'oeil ne trouble point l'osier ; Le sourire complice, dépourvu de malice, Il accueille secrets dépouillés d'artifice, Boit l'eau pure des larmes sur les joues éplorées.
Le temps suspend son vol et oublie ses repères Et l'instant solitaire se noie d'intimité : Une pluie d'étincelles secoue l'immensité, Brûlant le coeur et l'âme au bûcher de l'Enfer.
Le roseau indolent repose sous l'été Quand une main timide frôle sa solitude. - Est-ce vous, mon ami à la prude attitude, Qui venez me bercer de votre charme inné ?
- Près de vous, je l'avoue, j'ai bonheur à venir. Les remous de mes jours, ma pensée tourmentée, Mon obscur avenir, trouvent sérénité. Etes-vous le destin qui chasse souvenirs ?
De saison en saison, d'amour et d'amitié, D'orages en embellies, la vie tourne ses heures Et la lave des coeurs donne aux cieux ses couleurs N'osant imaginer un horizon fané.
Il arrive parfois qu'au mauvais de l'automne, Sous le masque enchanteur sommeille volonté, Sous le velours des yeux, rigueur et fermeté L'amour plie sans mot dire, s'interroge et s'étonne
Mais jamais n'abandonne face à l'autorité ; Du chêne et du roseau* avez-vous souvenance ? Relisez la morale avec intelligence : Que sa sagesse, en vous, soit à jamais gravée !