Tandis que le vent soufflait sa froide fureur En faisant valser les lanternes de la fête, Une foule vêtue de laine et de chaleur, Le regard fuyant, s’engouffrait dans la tempête.
Même les vitrines allumées de gaieté N’éclairaient pas les yeux cernés de lassitude De ces gens qui n’avaient qu’une hâte : rentrer, Retrouver leur nid douillet et leurs habitudes.
Comme les autres nuits précédant celle-ci, Il est là, sous le réverbère décoré, Fixant avec envie les tables des nantis Débordant du superflu de la société.
Il n’avait mangé qu’un morceau de pain rassis, Noyé son amertume dans un vin bon marché, Vomi l’injustice qui entourait sa vie Et vociféré contre l’inégalité
Et pourtant, il était là comme chaque soir Guettant la fermeture de ce restaurant, Prêt à se battre pour des restes dérisoires D’ailleurs convoités par les chats et chiens errants.
Il lutte aussi contre ce froid qui l’engourdit ; Il ne doit pas se laisser choir sur ce trottoir, Il doit défier la mort encore cette nuit… Enfin, les derniers clients longent le comptoir.
D’un pas hésitant, il traverse la rue ; Lui ne baisse pas les yeux, il fixe les poubelles Où l’attendent déchets, surplus et détritus. Ce soir, sous son carton, il remercie le ciel