La campagne s’endort. Le temps est immobile. Saignent en silence les ondes de l’étang, Ecoulements de sang, traces indélébiles Des sanglots d’un ciel mourant en se noyant.
L’ombre des grands arbres se couche sur la berge : Esprits vêtus de noir, spectres de l’enfance Tapis au fond de l’âme, leur maison, leur auberge Qui, au détour d’un soir, surgissent du silence.
Au loin, les montagnes endeuillées par la nuit, Entre ciel et eau, plantent leurs doigts d’épines Dans l’Olympe sanguine, en ce jour qui s’enfuit, Et l’empêche de choir dans les eaux purpurines.
Il n’est plus bel instant qu’un coucher de soleil ; Quand nos yeux se plongent dans la mer sidérale D’un univers serein où le Beau émerveille, Nous sommes l’Univers, la Nature triomphale.
Ils sont doux ces moments où, rempli de ciel, Le coeur ourlé d’amour contemple l’infini, Sublime l’horizon et voit l’essentiel, Se penche sur le Temps et sourit à la vie.
Sur l’âme se pose le regard d’Aphrodite ; D’un battement de cils, elle charme les rêveurs, Rassure les enfants que la frayeur habite Et parfume les draps aux senteurs du bonheur.