Je me souviendrai de ces temps d’illusions Je portais l'innocence dans les yeux Je croyais aux premières lueurs des aurores bleues Je croyais au soleil succulent du printemps, Aux beautés adoucissant les graves tons.
Je me souviendrai de ces temps d’illusions, De ces matins aux sourires factices De ces moments pénibles, pauvres en délices Où mes attentes rimaient avec les soupirs Ébranlant les entrailles d'une âme à fuir.
Je me souviendrai de ces temps d’illusions, De ces longues journées folles de haine De ces engins diaboliques sur les scènes Qui attisaient le feu de la discorde déjà déclaré ; Géhenne, qui biffe les sourires et les lunes éclairées.
Je me souviendrai de ces temps d’illusions De ces couleurs devenues objets répugnants Inondant mon itinéraire d'échos poignants Que je consommais tout lentement sur mon lit Asile de remords, fief d'insomnie.
Je me souviendrais de ces temps d’illusions Où la parole prenait la forme d’un rocher à briser Sous un soleil dardé que l’enfer n’a rien à jalouser Ne serait ce que pour étancher la soif d’une langue tarie En quête de liberté et de pouvoir de dire sans aucun pari.
Je me souviendrai de ces temps d’illusions De ce jardin d'érudition gagné par la peur et la misère Où toutes les idées se disputaient comme des vipères A l'insu des opinions qui n'osaient nullement croire Que cet Éden perde un jour sa convoitise et sa gloire.