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Les lémures ont des oreilles

C'est l'histoire d'un chien japonais
qui se rend à la gare
pour attendre son maître,
par habitude -
et c'est vraiment inhumain l’habitude

Mais son maître est mort
(de façon tragique bien sûr)

Il n'a donc plus rien de vivant
plus rien d'humain non plus, ce maître
qui donc ne viendra pas
Qui donc ne viendra plus
mais qui (parce qu'on est au Japon)
envoie son fantôme
à la rencontre du chien esseulé
et ignorant de son état
qui ne pleure pas encore la disparition d'un maître dont il attend
aussi l'habitude
mais la récompense !
seul salut des braves de son espèce
(mammifère certes mais non humaine)
dont le regard seul forcerait à croire qu'ils ont une conscience
- que l'on sait absente ;
alors qu'il ne leur manque que la parole

Le fantôme
- qui est gentil qui veut rendre service
mais qui ne sort pas souvent de son cimetière
trop médusé par la contemplation de l’infini
nouvellement ouvert à lui
- ne sachant plus
non plus
la force de l'habitude -
descend du mauvais côté du train
sur le mauvais quai
du mauvais côté de la gare
sûrement un mauvais jour
où il aurait fait bon rester dans son caveau
à prier pour le salut de son âme

Sur ce quai, égaré
il suit la déambulation des habitués à croire
que leurs déambulations dépend d’eux-mêmes
et leurs retards dépend des autres

Certes, les lémures ont des oreilles
mais le maître ne voit pas le chien
trop occupé à mater les petites écolières qui rentrent de l’école
parce qu'il y en a beaucoup plus dans les gares que dans les cimetières ;
ce qui lui laisse penser dans son esprit éternel
qu'il commence à aimer les gares
et qu'il n'est jamais trop tard

Mais le chien devine son maître
dans l'enveloppe éthérique
qui oscille à l'onde puérile des tendrons
sur l'autre quai
de l'autre coté de la gare
le mauvais côté

Il s'élance vers l'inconnu
vers ce côté où un bon chien ne s’aventure
que dans les pas de son maître
et sous son autorité bienveillante
Où un bambin se fait apprendre la règle d'or des traverses
des chemins que l'on croise
: la fameuse règle du "un coup à gauche, un coup à droite »
comme pour dire au monde
au destin
et à la fatalité
qu'on ne les ignore pas
qu'on les salue en les regardant venir

Mais comme toute bête qu'il est
il s'élance.
Il ignore le destin
comme toute bête qu'il est

Et là…
ZAN NÉN le chien japonais !

Il y en a eut partout !
c'était sanglant
et triste
à vous faire vomir des larmes

Il n'y a pas de morale à cette histoire
comme il n'en arrive jamais en occident
ou alors en beaucoup plus courte