"Je voudrais un ami" se lamentait le roi ; D'argent, je suis pourvu et pour toute la vie, Courtisans et laquais me suivent au pas Mais c'est d'un être cher dont j'ai le plus envie.
Mon château, mes bijoux me sont biens très précieux ; Ne saurais m'en défaire sans beaucoup de tristesse, Ils ne peuvent remplacer ce qui semble à mes yeux Encore bien plus précieux que ces grandes richesses.
Certes tous mes jardins me sont endroits exquis, Je possède des terres à perte de vue, Tous ceux s'y promenant se découvrent ravis Lorsque leur roi y passe et digne les salue.
Certes, de grands messieurs m'honorent de leur présence : Savants, artistes peintres, élégants musiciens ; J'ai chaque jour qui passe une vraie joie immense De les avoir pour moi, quel merveilleux destin!
Bien qu'étant acclamé par une foule de sujets Et ayant pour épouse la plus belle des femmes, Le cadeau le plus beau, celui qu'il me faudrait Est un ami, un vrai qui puisse combler mon âme.
Un jour, le roi partit et seul dessus ses terres, Il n'avait point carrosse, ni habits somptueux ; Plutôt qu'un roi puissant, pour sûr il avait l'air D'un homme de la campagne, travailleur laborieux.
Habilement déguisé, personne ne reconnut L'homme riche et puissant qui faisait travailler Dans son vaste domaine si bien entretenu Des humbles roturiers bons et plein de fierté.
Il marcha bien longtemps, se perdit en soirée Et eut couché dehors si un brave paysan Ne l'avait vu au loin et l'avait consolé Lui promettant couvert et toit bien gentiment.
Réconforté alors par l'hôte de cette maison Qui n'avait rien de plus que l'hospitalité, Le roi se prit pour l'homme d'une grande passion Et découvrit enfin ce qu'était l'amitié.
A partir de ce jour quand il s'aventurait Sur ses terres immenses, marchant incognito, Le roi rendit visite à l'homme qui lui avait Et sans le moindre échange fait le plus cadeau.