Petite thaï travaille pour nous à filer doux Des chemises toutes tailles qu’elle taille dans des tissus h Un faubourg de Taïwan, la poussière d’un bouge Glissement des sampans, pas un enfant ne bouge
Petite thaï bataille et chacun de ses jours Est un exploit qu’on exploite, morceau de bravoure sans amou Pour un bol de riz et quelques fruits secs Sans révolte et sans cris sur une planche de teck
Le jour elle file du mauvais coton La nuit elle file à l’abri des patrons
Petite thaï bonzaï avec ses doigts de fée Les cheveux en bataille, la tête ébouriffée Les grands champs de lin bleu où elle gambadait bébé Comment croire que c’est eux qui lui feraient ce dos courbé
Petite thaï défaille, bourgeon de bois d’ébène Sans papa elle déraille, ça ralentit la chaîne Le napalm coule à flots dans ses veines eurasiennes A la gorge un sanglot, elle attend que son heure vienne
Le jour elle file du mauvais coton La nuit elle file à l’abri des patrons
Petite thaï qui baille sous l’œil noir qui contrôle « Mamma San » la détaille, un papillon sur l’épaule Dans sa toile d’araignée, offerte en sacrifice Nulle justice n’a régné sur le métier où elle tisse
Le jour elle file du mauvais coton La nuit elle file à l’abri des patrons
Le soleil s’est endeuillé à la lumière du levant La pluie a cousu l’horizon … de fil blanc Et des œillets aux boutonnières … des révolutions