J'aime les arbres musculeux D'hiver : ils se tordent en tout sens Comme s'ils étaient torturés, Assaillis par de noirs tourments. Je regarde leurs blêmes corps Inertes se contorsionner De concert, me faisant penser A de fous derviches tourneurs.
Que cherchent-ils, à se ployer Puis à se déployer Ainsi Dans le vide du ciel bleu Qu'ils tentent de griffer, rageurs ? J'observe Leur ballet crochu, Leurs callosités, Leurs biceps, Leurs triceps de tricératops Qui se renflent Avec fureur Et je suis fascinée par leur Nudité toute en torsions, En pâles rotations griffues, En cabrements déchiquetés. Ils se meuvent, les uns auprès Des autres, ils s'affrontent En duels, Donnent des coups d'épée dans l'air, Essaient d'éperonner le ciel, De l'ébranler à grands renforts De rudes, âpres déhanchements, De déformations boursouflées, D'irrégularités bouffies, De bosses suivies des plaies Que sont les cratères obscurs Profondément ancrés en eux; Leurs tentacules aux noirs réseaux Arthritiques et compliqués Prennent un air de barbelés Qui voudraient enlaidir L'azur.
C'est beau, de les voir s'empoigner Et tournoyer, comme honteux De leur aspect hivernal, brut, Perclus De colère noueuse.