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Patrick DUCHEZ

La Moldau

(En l’honneur de Bedrich Smetana 1824 – 1884)

Un air papillonnant d’une flûte en roseau,
Un léger pincement d’un doigt sur une corde
Et l’on entend déjà le petit chant de l’eau
Qu’un vent de violons enveloppe et déborde.

Il s’étire et descend jusqu’au bout de l’archet,
Ce ruisseau ravissant traversant la Bohème
Qui valse sur un air tout bien endimanché
En faisant miroiter ses éclats de diadème.

Au milieu des forêts, gîtes des farfadets,
S’écoule son courant étiré par un cuivre,
Où s’abreuve un grand cerf qui, roi des cervidés,
Entend le son du cor dans le bois le poursuivre.

Puis son onde frissonne aux accords guillerets
Annonçant sur la rive une fête champêtre,
Égayant les blés mûrs colorant les adrets
Et dont les chants joyeux s’en viennent la repaître.

La nuit tout en douceur tend son voile bleuté
En laissant s’échapper des cordes de la harpe,
Les douces roussalkas qui, dans la pureté,
Portent pour seuls atours les astres en écharpe.

Saint-Jean est annoncé d’un torrent de hautbois,
Cymbales percutant les vagues sur la roche
Et s’agitent les eaux des remous aux abois
Contre les percussions au son qui s’effiloche.

Le calme enfin revient, le flot majestueux
Avance dans son lit, orchestre sur la vague,
En baignant Vysehrad d’un flux respectueux,
Brûle ses violons en l’honneur du vieux Prague.

Elle arrive, sereine, au bout de son destin,
Vient expirer, docile, au son d’une trompette
En jetant ses accords dans l’Elbe qui l’éteint
Pour offrir à ses eaux une gloire complète.