Voici venu le temps où la force déserte Un peu plus chaque jour Mon corps qui se refuse au mouvement inerte Dans le dernier séjour. J’ai traversé la vie aux gais instants de liesse, Aux nuits de flibustier. « Je veux refaire le tour de ma folle jeunesse. Taverniers, retournez les grains du sablier ! »
J’ai goûté le sucré qu’offre la peau des femmes En douce pâmoison. Et souffert le martyre au bûcher de leurs flammes Quand vint la trahison. Le temps a dispersé fidèle ou bien traîtresse Dont je fus le geôlier. « Je veux refaire le tour de ma folle jeunesse. Larronnes, retournez les grains du sablier ! »
Ma famille a semé des croix au cimetière. Témoignages figés De ceux qui sont allés vers une autre frontière Aux charmes mitigés. Attendez pour creuser mon studio d’une pièce Sans aucun mobilier. « Je veux refaire le tour de ma folle jeunesse. Croque-morts, retournez les grains du sablier ! »
Dans le lit aux draps blancs ma carcasse vieillarde Attendra le grand soir. Celui qui voit venir la hideuse camarde Pour couper tout espoir. Si la gueuse m’accorde une seule promesse, Un vœu particulier : « Je veux refaire le tour de ma folle jeunesse. Thanatos, retournez les grains du sablier ! »