Achéron, grand fleuve de l'Hadès bas au sud Qui honore de ses maux les morts en lambeaux Où nul ne peut espérer la moindre quiétude Dès l'instant où les corps sont jetés aux tombeaux
Ondes de maints calvaires dont l'âme s'arbore, Fleuve-dieu aux courants vils et nourris de peines Bercent les damnés que tout servant chaste abhorre, Des ombres froides qui jamais ne furent saines
Là s'épanche comme les exclus de la terre Un régiment de lémures aux ailes noires Ne pouvant fendre les vents que crache l'éther Ils suivent les flots dans leurs esquifs dérisoires
Meurtris, ils naviguent avec ceux trépassés Dans cette rivière habitée de douleurs Où les spectres ne subiront jamais assez Les sévices enténébrés de tous leurs pleurs
Ils sombrent pour mieux goûter la soif des démons Sombrent au creux de son lit, effleurent ses fonds Vers l'affluent limoneux du Cocyte chtonien Sans sépulture, ils museront longtemps sans lien
Achéron, tourmenteuse aux écumes souillées Qui scellent la bouche de ceux qui t'ont rallié Des hurlements horribles altèrent les vents Parvenant du fleuve où s'aggravent les tourments
O, Disciple de la noirceur de la géhenne Va, lèsent-les tour à tour au creux de tes veines Là où ruisselle le sang qui va se parfaire Dans la noirceur du vestibule des enfers