Au fil du Rhône je me suis laissé descendre sans savoir où j'allais me prenant pour Rimbaud dans mon pauvre bateau ivre de mes rêves inassouvis J'allais glissant de jour en jour dans la nuit verte de l'ennui Le long des berges de grands oiseaux aux yeux moqueurs m'écoutaient réciter les vers du grand poète Les images défilaient les haleurs étaient bien loin et la lune atroce ressuscitait mes amours ratées O combien de fois j'ai prié l'astre impavide pour l'amour d'une belle combien de fois j'ai prié pour un soleil moins amer que le poison funeste emplissant mes veines Je ne puis plus baigné de mes langueurs croire en mes rêves et mes espérances plutôt m'enfoncer dans l'onde épaisse laisser mes poumons se remplir d'une eau visqueuse et en finir doucement sombrer dans le néant au fil du Rhône sans atteindre la mer bienfaitrice