Un vent fou et fiévreux sous un soleil de fer En bouffées de chaleur remontait de l’Enfer Arrachant sans effort aux arbres enfeuillés Le tapis éphémère étalé à leurs pieds.
L’ombre rampante et noire se détachait du sol Puis s’arrachant des troncs, ultime liberté En écharpe de cendre dans le vent déchainé Feu-follait sans boussole dans le souffle d’Éole.
Dépouillée de ses draps la terre mise à nu Inondée de lumière et privée de sa mue Implorait à ses arbres pour retourner le sort De rappeler les fuyantes, évadées du décor.
Qu’elles retournent à leurs places et se couchent à nouveau, Sur le lit d’herbe grasse entourant le bouleau, Le chêne ou le pommier, au pied du saule en pleurs Transformant son chagrin en larmes de fraîcheur.
Il s’en fallu de peu qu’égarées dans les cieux Les belles ténébreuses enivrées de ciel bleu Ignorant le danger ne prennent goût au vent Et se laissent emporter au jeu du mouvement.
Dans l’errance du temps, en lambeau d’illusion Elles volaient, elles voulaient, s’élever, s’envoler, Au dessus, au dessous, en dansant s’élancer Comme on flambe sa vie dans le feu de l’action.
Mais l’ardeur du vent atteignit ses limites, S’essouffla de lui-même laissant place à l’azur Et les ombres lâchées rejoignirent le granit Alourdies par l’échec de leur folle aventure.
En rampant sans fierté vers leurs troncs respectifs Charbonnant leur retour de traces éphémères Les fuyardes vaincues regagnèrent l’orme et l’if Comme les vagues au reflux se rejettent à la mer.
Obéir au soleil, à la lune parfois Attachée à un arbre gisant à son pied L’ombre meurt chaque soir par la nuit effacée Pour renaitre au matin, chaque fois, chaque fois.