Folia
En un délire inconvenant, deux chaises bancales
Cherchent à faire passer dans les annales
Le cruel croc-en-jambe d’une quiète table de nuit.
Un soir, une misérable branche de buis
Assistant à la scène indigne d’un opéra comique,
Demande à la vierge coincée dans son icône,
S’il est possible d’emmener à la clinique
Cette table meurtrie, chez deux mignonnes.
La réponse mariale vient du réveil matin
Sous forme du bulletin de santé quotidien.
La pendule se réfugie dans le conformisme bourgeois,
Imposant sèchement au reste du mobilier de se tenir coi.
La cheminée désaffectée, jalouse, aurait voulu l’annoncer,
En crache, crachotant un papal filet de fumée.
Sur leurs tringles, les rideaux, étonnés, tendent l’oreille.
RTL, au courant, préconise la salsepareille.
Du coup le lit saute prestement par la fenêtre,
Evitant sur la chaussée les pièges de trous traîtres.
Il emporte, en guise de chandelle, une lampe de chevet.
Au jardin public à surface inégale, il regrette le parquet.
Le pinceau de lumière, surprend l’autre table de nuit,
Buissonnière, butinant le pissenlit.
Enfin, le lit tombe sur un rouleau de papier collant,
Que, de ses doigts de pied, saisit en courant.
Revenu au cocon du bercail, il agite la sonnette.
Il voit surfer sur les marches d’escalier le poète
Qui vaque, regard étonné, dans ses rimes, et fixe la prose.
En haut, la table de nuit, est malade d’extase.
Le poète sur la jambe de la table, enroule le ruban,
La radio laisse entendre un ouf de contentement