Si j’étais une souche, Je me planterais Tantôt pour surveiller Une berge de rivière , Tantôt pour tenir éveillés Les yeux d’une clairière.
J’attendrais le vol léger Du martin-pêcheur. Je guetterais l’éclosion Des champignons.
Si j’étais une souche, Je songerais au temps Où j’avais encore des bras Que malmenait le vent.
Mais ce temps-là est révolu. Je ne suis plus qu’une souche Aux bosses disgracieuses Et à l’écorce fendue.
Je sais l’heure proche. J’ ai vu pourrir sur pied, Beaucoup de mes vieux frères. Que j’aime la chaleur du soleil. Quand le pic-vert Jouera des castagnettes
Sur mon épiderme Pour en extraire les vermisseaux, Je saurai le présent proche. Quand je ne l’entendrai plus, Je saurai la minute venue, Celle du silence non révolu.
Il se pourra qu’à mon pied, La vie grouille. Mes enfants posthumes Seront petits rameaux verts.
Les plus hardis, Seront arbres, Les plus beaux Seront souches.