Comme un songe illusoire, De la cave au grenier, J'ai cherché le moment De lui glisser: "je t'aime". Un trait d'esquisse, à peine. Je n'ai pas cru l'instant.
L'homme s'en est allé, Brusquement, ce matin, Sans revoir son jardin, Ses arbres, ses allées.
Chaque instant de ma vie Décrit des peurs, des craintes, Quelques chagrins sans plainte, Un vide qui me suit.
Il a été mon père.
On a cru se comprendre Et trouver dans la cendre Du foyer, un repère, Un signe, un simple geste Voulant dire: "je t'aime".
Je doute de ma peine; Le temps fera le reste.
L'homme s'en est allé, Poliment, comme un sage, Un roc au dur visage Que son âge avancé N'avait pas attendri. Je vois trembler des ombres Sur le mur toujours sombre De la chambre endormie. J'entends geindre les marches Sous ses pas mesurés. Les souvenirs passés, Débités à la hache, Encombrent ma mémoire.
De l'être autoritaire Ne demeure qu'un père Présent dans mon histoire.
L'homme s'en est allé, Doucement dans ses draps. Mon cœur lui dit: "papa, J'aurais voulu parler".