Premier témoins: Le Cheikh et la Perle Blanche; I
« Voici que le semeur est sorti pour oeuvrer,
Laissant au doux repos sa femme et premier né.
De la route escarpée il pouvait voir, déjà,
Des corbeaux attendant son labeur d’ici-bas.
Le vaste seuil de bronze au devant d’Hèmérè,
Par le fils d’Hyperion sur l’onde miroitait
Depuis quelques instants, que depuis bien longtemps
Notre père, affairé, ô inlassablement,
Ensemençait Gaïa, source de lendemains.
Les oiseaux festoyaient sur le bord du chemin,
Se piquaient fort du bec en relevant leurs ailes
Pour en intimider les rôdeurs pleins de zèle,
Avant que de partir, poussés par l ’appétit,
Vers l’autre terre aimable: sans même un pieux merci.
Déjà l’ombre à ses pieds restait sans s’éloigner,
Quand l’homme auguste et grand, le front lisse et perlé,
Choisit pour sa retraite un vieux chêne chenu,
Entouré de rocailles et de ronces barbues.
Les quelques grains tombés sur les endroits rocheux,
Où le terre en surface offrait très peut d’enjeu,
Germèrent promptement à l’ombre du vieux sage.
Mais quand le fort chariot eut contourné le mage
Aux branches gigantesques, écrasant sous ses roues
Les pouces pressurées, les racines, sans bouts
Ni allonge, épuisées, mourraient sans un soutient.
Tandis que le semeur clôturait son festin
Par des gâteaux de miel de l’Hymette enneigé,
Arrosant son palais d’un Formies tempéré,
Les quelques grains tombés sur le pointu des ronces
Essayaient vainement d’arracher de leur once
Un quelconque pécule; avant que de mourir,
Par leur hôte étouffés, sans avoir pu surgir.
Revenu à son champs, ô inlassable amant,
L’homme réconforté par le pain de cet an
Voyait croître en ardeur, sur sa compagne aimée,
Les heureux jours futurs à l’accent d’hyménée.
Etonné il compta jusqu’à Lam sur sa gauche;
Jusqu’à Sin à sa droite: jusqu’à Qaf en ébauche. »