Maintenant que tu es dans un âge avancé, Clouée dans un fauteuil, inapte à déplacer Ta carcasse percluse et ta grosse bedaine, Qu'il faut solliciter une samaritaine Pour te faire manger, te mettre sur le pot, Te torcher, te laver... J'abrège le topo; Ne penses-tu donc pas à la fable insolite De la grenouille mise à l'eau d'une marmite Dont la température est montée peu à peu Dans le but de la cuire ainsi à petit feu ? Va-t-elle s'esbigner à la première alerte Ou trouver du confort à la tiédeur offerte? Va-t-on la voir soudain, fâchée, se révolter Ou à ce changement plutôt s'acclimater ? Mais dans ce dernier cas, quand s'échappera-t-elle ? Quand, du danger sournois, lors s'avisera-t-elle ? Si trop elle y demeure, elle prends le pari D'avoir assez d'instinct pour se mettre à l'abri, Mais elle risque aussi de se retrouver cuite Avant de décider de fuir cette marmite ! En te voyant je pense à ce pauvre animal Mais tu as trop tardé, te voilà au plus mal, N'aurais-tu pas aimé que te vienne l'envie De te sortir à temps de ce bouillon, la vie ?