L’auberge de Combes
C’est un petit village au flanc de la montagne
Qui, de son nid, domine un pays de cocagne ;
Sur la pente boisée poussent le châtaignier,
L’yeuse méridionale et le chêne truffier ;
Dans un après-midi ensoleillé de juin,
Je l’avais, en marchant, par un sentier rejoint
- Un chemin que le thym sauvage aromatise
Et qui offre à cueillir des poignées de merises –
L’auberge de céans draine du joli monde,
Des gourmets provenant de vingt lieues à la ronde,
Des assemblées d’amis présents à seule fin
De faire à cette table un repas des plus fins.
Ce soir-là moi aussi, je fus de ces convives
Que le restaurateur maintient sur le qui-vive
Avec ses audacieux alliages de saveurs,
Ses assiettes offrant un cocktail de couleurs,
Son choix appétissant de produits de saison
Accommodés dans de hardies combinaisons,
Sa recherche poussée du détail qui engoue,
Qui interpelle l’œil, émoustille le goût.
La soirée fut festive et la nuit fortunée
Mais que dirai-je alors du petit déjeuner
Que je pris en terrasse et l’esprit virginal
Avec la compagnie du soleil matinal !
A mes pieds le versant couvert de frondaisons
De la vallée de l’Orb, végétale toison,
Modèle de forêt méditerranéenne
Où nulle construction, nulle industrie humaine,
N’entrave l’illusion de se croire soudain
Au temps où notre terre était un grand jardin.
Etre ainsi attablé devant tant de beauté
Avec un jus de fruits, une tasse de thé,
La coupelle de beurre et les petits pains chauds
Qui craquent sous la main et les dents du couteau,
Constitue le meilleur des antidépresseurs
Et verse dans l’oubli les idées de noirceur,
Repousse la déprime au trentième dessous
Et libère le col du plus tenace joug.
Dans ces dispositions, je pus, d’un pas léger
Et après avoir pris, de mes hôtes, congé,
M’enfoncer dans les bois pour fouiller les replis
Des monts du Languedoc, de richesses, remplis.
