Les vers de Lucrèce
Les mémorables vers du poète Lucrèce
Sont le miel destiné à nous rendre plus fort
Afin de renier la naïve promesse
D’un séjour éternel au-delà de la mort.
L’esprit avec le corps disparaît sans remède,
La lumière s’éteint du jour au lendemain,
Nul juge supérieur, pour notre âme, intercède,
Le monde n’est pas fait autour de l’être humain.
Des gourous, néanmoins, rivalisent d’augures
Pour nous vendre à grand prix des champs élyséens,
Des paradis peuplés de douces créatures
Toutes auréolées d’éthers céruléens.
Pour cela, ils voudraient nous empêcher de vivre,
Semer de privations le terrestre parcours,
Nous faire respecter les préceptes d’un livre
Et craindre le courroux d’une divine cour.
Si Dieu existe bien, comment oser prétendre
Qu’Il s’intéresse à nous, microscopiques vers
Confinés à ramper et toujours nous répandre
Sur cet astre perdu dans l’immense univers ?
Mieux vaut considérer d’un regard plus modeste
Notre humble condition de pauvres naufragés
Sans tabler sur l’action d’un bienfaiteur céleste
Pour nous tirer du sort qui nous est infligé.
Profitons des bienfaits que nous offre la vie,
Buvons à chaque source et goûtons tous les fruits,
Succombons au plaisir dont il nous prend l’envie
Sans être toutefois, à des excès, réduits.
« Carpe diem » disait un autre ancien poète,
Jouissons du moindre instant qui nous est accordé,
Observons la beauté que chaque jour décrète,
Sachant avec respect nous en accommoder.
Lâchons à notre corps sa vigueur naturelle,
Testons tous les ressorts de son agilité,
Ne lui refusons pas la communion charnelle,
- Le jeûne sexuel est une absurdité –
Engageons des projets que la vertu professe,
En étant créatif pour les acheminer,
Cultivons le jardin de fleurs ou de sagesse
Que notre vocation nous fait imaginer.
Soyons les promoteurs de notre intelligence
Pour tâcher d’être heureux sans bêtement bluffer,
Pour, avec des amis marqués de tempérance,
Echanger des idées et pour philosopher.