Pour avoir croisé son regard Une seule fois au hasard Un jour au milieu de la foule, Dans le misérable réduit De mon esprit morne, depuis, Tout un branle-bas en découle.
C'aurait pu être ses cheveux Parés de reflets lumineux, La pulpe de sa lèvre offerte, Ou bien les signaux assassins Lancés au jugé par ses seins Qui aient mis mes sens en alerte.
Mais non, ce sont les dévidoirs Vertigineux de ses yeux noirs Qui ont allumé l'étincelle Responsable de mon état Et sont le nouveau potentat Dont je dois subir la tutelle.
Sans l'avoir pourtant étudié, Derrière le moucharabieh Qui opacifie sa pupille, J'ai le pouvoir de deviner Tout un univers raffiné Dont le désir est l'estampille.
Une chambre dont le cocon S'ouvre sur un large balcon Et un patio au clair de lune, Le parfum du jasmin qu'on sent Se diffuser comme un encens Dans la douceur de la nuit brune.
Son ombre nue se faufilant, Jouant avec le rideau blanc Qui se soulève dans la brise, Sa silhouette sans pudeur Qui erre, goûtant la fraîcheur Et à tout courant d'air se grise.
Confondu en flagrant délit, Son corps étendu sur le lit, Qui ondule sous les caresses Et subit le feu de ce gril Des chevilles jusqu'au nombril Et de la nuque jusqu'aux fesses.
Mille et une nuits de plaisirs, De murmures et de soupirs Qui enflent dans une escalade, Mille propos sur l'oreiller Dans chaque soirée à veiller Près d'une autre Shéhérazade.