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Renaud BOSC

Que le spectacle soit !

J'ai un goût prononcé pour les retransmissions
De courses de vélos à la télévision;
D'aucun me parlera de foot ou de rugby
Mais ne me convaincra jamais de sa lubie,
Dans des gonzes courants sur un rectangle d'herbe,
Pour un pauvre ballon, qu'y a-t-il de superbe ?
Concernant le tennis, je ne vois sans arrêt
Qu'une balle sautant par-dessus un filet.
La lutte ou le judo me semble un bon moyen
D'inhaler la sueur d'un autre citoyen.
Au diable le Dakar et le sport mécanique,
Toute la gabegie du bazar olympique,
Parlez-moi de Roubaix, de Milan San Remo,
De la Vuelta, du Tour, du Ronde et du Giro,
Le stade est à la taille, ici, d'une province
Et même d'un pays, voilà un Parc des Princes !
Les vues d'hélicoptère, ainsi, nous gratifient
D'un cours pour réviser notre géographie;
Nous pouvons admirer les plaines et les monts,
Les villages, les lacs, les fleuves sous les ponts,
Des ouvrages marquants des âges de l'histoire,
Des formes de maisons, de toitures, notoires,
Les vignes, les vergers, les serres, les forêts
Qui, de l'agriculture, exposent les secrets.
Et pour en revenir à la course, l'on voit
D'en haut le peloton, ce long ruban étroit,
Progressant sur la route au gré des reptations
Que le serpent emploie à sa locomotion,
Les attaques fusant, les nombreuses cassures,
La technique du sprint, et celle des bordures.
Avec les caméras tenues sur les motos,
Nous voici embarqués au milieu des vélos,
De ces horlogeries, fines et rutilantes
Dont les rais du soleil éclaboussent les jantes
Et qui tournent sans cesse à l'énergie des cuisses,
Bielles que la sueur et les huiles vernissent.
Les garçons se coudoient, s'affrontent du regard,
Bluffent comme au poker, un démarrage part,
L'un cède et l'autre suit, chacun abat son jeu,
Mais qu'ils soient pleins aux as ou soudain besogneux,
Pour hisser leurs kilos vers le sommet du col
Ou débouler à bloc jusqu'à la banderole,
Il leur faut, de courage, un volume optimal
Et exploiter le don de se faire du mal,
Eux qui savent livrer cette cruelle joute,
Eux les intempérants lévriers de la route.