Le sommeil a le don d’être plus ambitieux Que les projets conçus avec notre conscience Et l’on reste pantois face aux tours audacieux Que révèle au matin sa complète licence.
J’avais ainsi rêvé d’une blanche bastide Qu'un maçon exercé au lithique toucher Eut bâti en ayant assez de coeur candide Pour ne pas, vers l'emphase, expressément pencher.
Sous le dais miroitant d'un ciel adamantin, Somnolait au soleil cette bâtisse sûre Où s'organisaient, plein d'un désordre lutin, Terrasses, appentis, escaliers et voussures.
Au passant curieux d'entreprises humaines Et de l'architecture, amoureux patenté, S'ouvrait complaisamment la porte du domaine Sur un seuil espacé inondé de clarté.
Il pouvait, au dedans, de l'une à l'autre pièce, Déambuler longtemps sans mésaise apparent Ni pendant sa visite avoir l'oeil qui se blesse A la saillie marquée d'un angle incohérent.
Des meubles patinés par le temps et l'usage, Choisis avec patience et finement placés, Donnaient au visiteur l'indicible présage D'un séjour dont jamais on ne doit se lasser.
De larges pans de ciel, sur la pierre conquis, Permettaient fréquemment à la pensée rapide De longues évasions vers un proche maquis Que des vents dissolus baignaient d'un air limpide.
Pour le sage qui sait comprendre et observer, La maison possédait de ces douces alcôves Que seule l'insistance autorise à trouver Et qui sont tenturées souvent de teintes fauves.
Aujourd’hui, la magie du moment s’est ternie Et si le souvenir demeure insaisissable, Me reste l’impression d’une belle harmonie Qui gonfle mon esprit d’un élan favorable.