Vos
poèmes

Où est cette mélancolie
Qui me collait tant à la peau,
La seule véritable amie
Ne m’ayant jamais fait défaut ?

Qu’ai-je donc fait de la noblesse
Du fameux spleen baudelairien
Que dans l’élan de la jeunesse,
Je m’imaginais être mien ?

Qu’est devenu ce vague à l’âme
Dont mon esprit était friand
Et dont le vaporeux dictame
M’était un baume lénifiant ?

Comment retrouver mes repères
En vieux chemineau patenté
Sans le blues aux savants mystères
Qui venait souvent me hanter ?

Désormais, dans la vie j’avance,
M’engageant la fleur au fusil
Contre les lacs de circonstance,
Décontracté, droit comme un i.

Sur ma tête, plus de nuages,
Plus de brouillard à l’horizon
Ni de tourmente pour bagage,
Le ciel bleu en toute saison.

Quelle triste monotonie,
Ce climat toujours pondéré
Qui au bout du compte m’ennuie
Sans brume épaisse où m’égarer !

Moi qui étais pusillanime
Et devant l’action, hésitant,
Le ténébreux et froid abîme
Me rendait l’esprit combattant,

Moi qui avais comme point d’orgue
De me gausser de ces cadors
Pleins de certitude et de morgue
Avec de sirupeux dehors,

Je me sens devenu moi-même,
Quelle extrémité, c’est affreux !
Représentant de cette crème,
Un quelconque imbécile heureux.