Ce n’est pas un bourgeois, ce n’est pas un richard, Pas plus un ouvrier qu’un humble fonctionnaire, Tout juste un journalier qui se loue au hasard Où se fait le besoin de deux bras volontaires.
Il n’a pas de maison ni de chambre meublée, Son modeste logis, ce n’est qu’une cabane A l’orée d’un étang, tranquille et isolée Du monde malveillant qui rumine et cancane.
Ses amis ne sont pas de la plus fine fleur, Un poivrot, un oisif, un papi nostalgique, Un discret conducteur de machine à vapeur, La fille dont il rêve est une domestique.
La guerre l’a marqué de son cruel gâchis ; S’il en a ramené entière sa carcasse, Sans doute lui doit-il pourtant son anarchie Et l’envie de goûter chaque moment qui passe.
L’activité physique, un régime frugal, Lui gardent le corps svelte et la santé robuste, Il a belles ses mains en dépit de leur cal ; Il est propre et soigneux sous son air un peu fruste.
Son cœur est généreux et désintéressé, Sensible, attentionné pour les laissés pour compte, Il aide malgré lui ces gueux qu’a déclassés La bonne société dont ils restent la honte.
Il est pauvre bien sûr mais n’en est pas déçu Et le mot dignité se mesure à son aune, S’il est gagne misère, il n’est pas peigne-cul Et vous l’insulterez en lui faisant l’aumône.
Il ne fréquente pas l’église et les curés, Mais nombre de chrétiens qui désirent complaire Au Miséricordieux pourraient bien s’inspirer, Pour leurs règles de vie, de cet homme exemplaire.