Week-end à Fécamp
Que faire d'un week-end au début de janvier
Quand du nord, descendu, le froid s'est convié,
Sinon se débiner vers le bord de la mer
Pour emmagasiner du soleil de l'hiver ?
Destination choisie d'un doigt inconséquent,
Nous avons de ce fait échoué à Fécamp.
La ville sommeillait au creux de sa valleuse,
Repliée sur son port d'où -époque glorieuse-
Tant de terre-neuvas s'en allèrent jadis
Pour pêcher la morue, marins de père en fils.
Réfrigérées, les rues n'étaient pas envahies
Pas plus qu'entre ses murs la nef de l'abbaye;
A peine avons-nous pu prêter une rétine
Aux atours tapageurs de la Bénédictine
Que nous étions déjà sur la plage à flâner
Sous les cris entêtants des mouettes obstinées,
A prendre, des embruns, une longue rasade
Ou à gagner le phare au bout de l'estacade.
Puis nous avons gravi la sente aux matelots
Pour poser le regard sur l'horizon des flots
Et marcher tout au long de ces falaises blanches
D'où le pays de Caux se brise dans la Manche.
Enivrés d'air iodé et inondés de ciel,
Nous sommes revenus posément vers l'hôtel
Pour faire en tête à tête une bonne dinette
De sole à la dieppoise et de crêpe Suzette
Avant de nous presser dans le lit à couvert,
Couchés et accolés en petites cuillers.
Le lendemain, dimanche, il faisait toujours beau,
Nous partîmes à pieds comme des chemineaux
Dans une humeur féconde et un restant de brume,
Entre des vagues d'herbe et des vagues d'écume,
Avec une pensée pour l'ami Maupassant
Qui fut sur ces chemins un notable passant.
Devisant clairement, c'est sans beaucoup d'effort
Que nous avons rejoint la bourgade d'Yport,
Prochain havre niché dans un pli de la côte,
Cette côte taillée sur une lande haute,
Indigeste pudding de silex et de craie
Que la mer et le vent grignotent en secret.
Sur les galets polis de la plage déserte,
Mon appareil photo brusquement en alerte,
Je me suis essayé à saisir tes façons
Derrière ton écharpe et sous ton capuchon,
Bravant ta résistance afin que tu te fasses
A ton nouveau statut de starlette en cuirasse.
Ces souvenirs en boite, il nous fallu songer,
De notre parenthèse, à bientôt émerger,
Revenir sur nos pas, retrouver la voiture
Pour rentrer à Paris sans autre fioriture
Afin de commencer une nouvelle année
De travail, de loisirs, de projets mitonnés,
De moments à chercher d’inédites richesses
Avec pour fil constant, cultiver la tendresse.