Alors que tout s’est tu, au plus profond du soir, Quand le jour a éteint pour un temps tous ses bruits, Et que les âmes dorment, fourbues, emplies d’espoir, L’homme sur le banc attend ; doucement il gémit.
Sous ses airs de statue plus solide que la pierre Les craquelures ont rongé peu à peu le vernis, Et perlent désormais trop longtemps prisonnières Des larmes si lourdes qu’en torrent elles s’enfuient.
Abrité des regards parce qu’un homme ça ne pleure pas, Il abat ses murailles et laisse aller sa peine. Sans témoin de son sort il abaisse les bras Et glisse jusqu’au sol, sans façon et sans gêne.
Faut-il donc qu’il porte un malheur aussi lourd Pour pleurer dans le noir cette infinie tristesse, Pour s’effondrer ainsi, sans clairon ni tambours, Refusant de montrer la moindre des faiblesses.
Quand reviendront enfin les lueurs du levant, Et reprendront alors les chants dans les taillis, Chassant un peu plus loin les noirceurs pour un temps, L’homme relèvera la tête, les yeux un peu rougis.
Et debout à nouveau pour reprendre sa vie L’homme au jour sans un mot, sans un bruit et sans pleur Fera semblant, fera avec, fera comme si Plus tard, qui sait, et si revenait le bonheur ?