Je sens au fond de moi comme un feu qui me ronge Mais qui brûle si froid et sans bruit se prolonge Qui me glace d’effroi m’ensorcèle et me plonge Bien plus loin, bien plus bas, Aux tréfonds. Est-ce un songe ?
Faut-il donc que je crie Au secours ! Je me noie ! Faudrait-il que je prie, aurais-je au moins la foi ? En parler mais à qui, que dira-t-on de moi ? L’animal s’en réjouit Il n’est pas aux abois.
De ces griffes effilées, sous les serres qui me percent Dans l’enfer des damnés la douleur me renverse Et le corps ébranlé par la glace qui le gerce. Pas pleurer, pas crier, Seule la peur me traverse.
La bête est réveillée, le crabe caméléon Nourri de tant d’excès a pris son aiguillon Il vient se faire payer dans un grand tourbillon Mon âme écartelée En obole à Charon.
Caché au fond de moi, cela fait si longtemps Accroché à sa proie, il œuvrait en dormant Le crabe était en moi, immobile et patient, À me sucer le foie, Irrémédiablement.
Mais la messe n’est pas dite, je le jure devant toi La maudite amanite ne fera pas la loi, C’est la vie, pas la fuite, on se bat, on y croit, De cette course-poursuite Un seul l’emportera.
Affronte-moi donc l’Abcès, as-tu peur du combat ? Sous tes couleurs, caché, tu te répands en moi Mais je vais m’en tirer, je le sais, je te vois Déjà plus acculé Tu faiblis pour une fois.
Dites-le bien alentour, aucune prophétie Ne prédira le jour où je quitterai la vie. Pas de destin qui courre, mais l’envie d’un sursis Seule la force en secours M’en donnera l’usufruit.