J’aurais pu te donner le meilleur de moi-même Mais le meilleur de soi pour Dieu semble un néant Si j’ai lâché ta main, c’est parce que je t’aime A me fondre en la horde où les loups vont bêlant
Comment ai-je pu vivre avant de te connaître ? Et toi, m’espérais-tu quand tu étais enfant ? Et mes poèmes, dis, comment ont-ils pu naître ? Avant toi, ai-je été ? Qui étais-tu AVANT ?
Oh, sans doute, ai-je écrit pour occuper l’attente Ou pour me préparer à t’accueillir en moi Ou partager sans le savoir ta vie dolente Poète, que fis-tu ? Et pour qui ? Et pourquoi ?
(Avant que cette Reine habitât ton Royaume Fut-ce un désir sans nom que le temps d’autrefois ?) Oh, tandis que tu viens récupérer ton trône Je me soumets d’amour à l’Amour, à la Loi
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Un vertige a passé me couvrant de son ombre Et jetant dans mon cœur un feu qui ne meurt pas N’avais-je pas, plutôt que l’ombre un regard sombre Avant de t’avoir vue, ma Reine de Saba?
Mon cœur te cherche, Amour, à travers le bocage Il n’y a de repos que pour t’appartenir Partout je crie ton nom de rage sans courage Aimer me pousse ailleurs, cet instant à venir
Il a hissé la voile avant que le vent porte Et mon cœur, pauvre cœur, lambeau d’immensité Entend rire la mer qui hait ceux de ma sorte Ou les aime en ogresse au festin apprêtée
La mer ? Quand je la vois, je cache mon visage Que Dieu la fit pour nous, vrai, je le savais trop O Mer, monstre de rêve, évacue mon rivage ! Va-t’en avec mes pleurs et laisse mon cœur gros !