J’ai tant tété à ta mamelle Et dormi dans ta verte couche Mon Ariège louve farouche, Ta glèbe colle à mes semelles. Je suis d’érable et puis de hêtre Basses futaies, ronces tenaces Qui ne craignent gels ou menaces, Enraciné dans ton mal d’être.
Pleure en mon cœur le vent d’Espagne, Je suis l’enfant de ces montagnes.
Je suis d’eau vive et de cressons Je nie en toi le temps qui passe Même si l’ombre me dépasse Et si les blés sont en moissons. Même si là, le jour décline Et jaunit le bois de saison Automne, automne en ma maison Peins moi l’image des collines
Et tous tes troupeaux m’accompagnent Je suis l’enfant de ces montagnes.
Je suis de vent, de valérianes, Ubac l’été au creux des rus Soula au soc de la charrue Adret au cœur de tes soulanes Et tu m’enfantes mille fois Dans le maquis de l’Escabelle Au cœur maudit de ce rebelle Que fut Roger comte de Foix
J’ai vécu toutes tes campagnes Je suis l’enfant de ces montagnes
Je te fuis mon rêve nation Ma patrie de cœur et d’entrailles Mais en moi couvent tes semailles Aux lentes germinations Et je reviens de la grand ville Avec les yeux toujours lavés Et mon mal de toi aggravé De ton amour indélébile.
Comme bulles sont au champagne Je suis l’enfant de ces montagnes.
Ma terre amère de cassures De schizophrènes prophéties De douce mousse et puis d’orties Ah que tes craintes me rassurent ! Dans ton corps vont deux cœurs jumeaux Le bien, le mal, le faux, le vrai Pour chanter les soleils givrés Nous n’avons pas besoin de mots
Mais que ton silence me gagne, Je suis l’enfant de ces montagnes