Il n’est rien qui soit doux et rien qui soit cruel Comme ces souvenirs que de vous j’ai appris, Pages blanches noircies de leurs mots de mépris Du mur des fédérés érigé à Teruel Nos peines sont partout où le deuil nous surprit.
Lorsque le mois de mai rougit en nos cerises Ou bien lorsque décembre en ses brumes s’étend Il revient à mes yeux l’image de ces temps Où les couleurs de vie soudain devenues grises Mettaient en nos Courbet l’Espagne au cœur battant.
Ah tu seras toujours, poésie de l’espoir, Le rêve seulement qui chût avec fracas De ce père Lachaise au cœur de Guernica Pour qui mélange amour et puis fol désespoir En confondant Clément avec Garcia Lorca.
Je sais, je sais combien, tout en moi se mélange Théâtre de Shakespeare et celui de guignol Un air de la sociale et l’accent espagnol, Le gout de la cerise et celui de l’orange Commune de Paris privée de rossignol.
Indignés avant l’heure et tout à fleur de peau De Bakounine à Marx, pavé ou embuscade, Parcourant les sierras ou sur la barricade Vous mêlez rouge et noir aux plis de vos drapeaux Insurgés de Paris, combattants des brigades.
Vous fûtes ces vaincus, fusillés sur les places Ou bien ces exilés dont l’histoire dévie Communards de Bel’ville aux parcours indivis Rouges noms d’Aranjuez que les rosiers enlacent, Je n’ai que ces mots là pour évoquer vos vies.