Je vois de ma fenêtre un coin du Rialto, Venise au petit jour s’est habillée de brumes On dirait que de haut il tombe des écumes Et Jane ce matin me parle en contralto La plus grave des voix que lui permet son rhume.
Hier nous avons joué, dansé la farandole, Dans ce quartier perdu pour touristes absents Aux palines étions bien moins que vingt et cent, Fantôme dans la nuit, passait cette gondole Qui fuyait devant nous au rythme des passants.
Il chantait en ce jour, le dernier de l’année, Pour une fleur Gina, la tendre barcarolle Ce gondolier têtu qui balbutiait son rôle Sans savoir que l’image en était surannée, Cette époque se meurt, lointaine et pourtant drôle
Ah que restera-t-il de la carte postale Où l’on voit des pigeons tous disposés en arc, Fientant sur la toison du lion de saint Marc ? Maintenant au marché du vieux Lido s’étale, Cette fleur de Venise aux fins fonds d’un vieux parc.
Ma jeunesse se perd au bout d’une romance Echeveau du destin que la vie dévida Alors qu’un beau matin, soudain se dérida La où stagnait l’esprit en sa pleine dormance La surface des flots bercés par Dalida.
Janvier frileux s’éveille à la brumeuse aurore J’écoute la chanson que le mythe éternise « Quand on ne s’aime plus que c’est triste Venise » Chante Charles Aznavour, mon Dieu, je le déplore, Mais elle est triste aussi lorsque l’on s’aime encore.