Nous aurons toi et moi, pour savoir la beauté, Des notes de musique aux pianos de la nuit Et nous nous les jouerons en ce monde enchanté Où les pleurs sont si doux aux mélanges des pluies. Reste en moi, près de moi, prolonge notre été, Par toi je désapprends les horizons d’ennui.
Redis-moi ces jardins au bout de la maison Où l’on se perd parfois sans espoir de retour Et puis tous ces baisers pris sous les frondaisons Ces ramées complices aux émois d’alentour, Redis-moi la charmille des quatre saisons Avec des orangers et des roses autour.
J’ai appris ton prénom dans mes balbutiements Il est de ces mots là aussi doux à mes lèvres, Vocable velouté mais ardent tellement, Et brûlant dans mon cœur du sel pur de mes fièvres, Je le dirai veux-tu tellement doucement Que personne saura s’il est « buis » ou « genièvre ».
Et je te construirai de lilas et d’oeillets Des châteaux de la nuit aux autans qui se lèvent Nous en ferons des nids au satiné douillet Comme en cet été là où mon cœur fit la grève, Et nous les offrirons aux lunes de juillet Qui nous les renverront revêtues de leurs rêves.
Après je volerai aux astres enflammés Tout l’or du soir tombé d’un poème d’Hugo Ou celui d’Heredia aux mondes condamnés, Du fond des océans en trésors de lingots, L’or des conquistadors aux temples profanés Dont nous décorerons nos rêves indigos.
Et enfin ma douceur nous nous abriterons Tout au fond de nos yeux, là où gît l’invisible, Au-delà de ces murs où le temps tourne en rond Où s’en vont les enfants, au monde inaccessible Et puis nous reprendrons aux chiens qui aboieront Notre âme nettoyée, une et indivisible.