Combien est-il de temps, combien de temps encor, D’être ce que l’on est, d’être ce que l’on croit Une ombre, un contre jour, comme un signe de croix Et puis se perd la vie au milieu du décor. Ma vaine solitude aux couleurs violentes Que ne t’aurais-je aimé pour tes soirs de velours Pour cette douce amère aux parfums un peu lourds Qui me faisaient de cendre aux braises si ardentes. A vous humer ainsi passantes éphémères, J’ai appris à mêler toutes mes confusions Le jour, la nuit, le vent, les mots dont nous usions Et ce lait tant tété aux seins de mes cent mères. Mes notes de regrets et mes vains mots d’humour, Exercices bâclés à nouer vos colliers Mes cahiers raturés, mes livres d’écolier, Ah oui combien de temps à trahir mes amours. Il est sous mon voilier le danger des murènes, Je m’en vais mon bateau au fil de l’eau dérive Oublierais- je le port là bas sur l’autre rive Où chantent les oublis dans les choeurs des sirènes Demain c’était déjà le temps qui tant s’incline Le devenir à vivre au livre des curieux Mais je saute la page où le mystérieux M’a quitté pour se perdre au-delà des collines. D’errances en regrets, je sais la déraison Mon cœur n’est qu’un moulage au creuset de l’étampe Viens douce contre moi et baisse un peu la lampe Je m’en vais avec toi au bout de mes saisons.