Le bonheur était là autrement que factice, Non pas dans ces instants aux plaisirs qu’on mendie, Mais à la fin du jour, au soleil d’incendie, D’un Saint Jean s’apprêtant à la nuit du solstice.
Le bonheur était là comme un rire d’enfant Dans leurs cris et leurs jeux que la joie dévergonde Autour de ce grand feu où ils dansaient la ronde Et qu’attisait l’autan, épars, nous décoiffant
Le bonheur était là dans ta voix de chansons Qui parlait de gabelle aux épis rassemblés Et me chantait l’été et la couleur des blés En l’aurore promise à la faux des moissons.
Le bonheur était là sans cesse prolongé Par mille facéties issues d’un même rite, Cette reine des prés et cette marguerite Que j’effeuillai ce soir dans tes cheveux de jais.
Le bonheur était là tout au fond de tes yeux Dans lequel je lisais nos deux vies à l’envers Nos rêves suspendus aux lointains univers Perdus bien au delà du simple merveilleux.
Le bonheur était là au sentier hasardeux Sur les bords du ruisseau courant jusqu’au village, Vers cette allée fleurie dont le sol en dallage Menait à ma maison toute emplie de nous deux.
Le bonheur était là au monde des lenteurs De nos gestes amis et de nos façons d’être Dans le cœur de l’été laissant par la fenêtre Entrer toute la nuit alourdie de senteurs.
Le bonheur était là et sur ta lèvre ouverte Qui me promettait tout en un gémissement, Palpitante et connue de ce frémissement Que je m’appropriai comme une découverte.
Le bonheur était là au païen sacrifice, Sous ta robe glissant le long de tes genoux Et l’amour éclaté en orage sur nous Nous laissant éblouis dans son feu d’artifice.