Dans une minuscule chambre de bonne Un lit défait pour tout décor où Une vierge languie y dort Elle vient offrir la beauté de son corps Au peintre qui la prend pour modèle L’artiste est triste Car il n’existe Que par le mélange des couleurs et Comme il porte en lui l’âme des saisons Il s’inspire de l’air du temps Et c’est l’automne (…) Il s’en va glaner ses tons Par les prairies comme par les champs Il choisit pour le fond de la toile Le gris frisé du ciel Qui par moment, Voile et dévoile La belle et chaude toison Pour imbiber la terre rêche Il dépêche sa plume-fraiche Ramasser l’ocre des fleurs sèches La trame manque encore de vie A l’image des arbres dégarnis Il se plaint… Dans sa tête le vent bat son plein Il est dans la tourmente… Quand le tonnerre gronde Par respect à l’exemple Il peine et peine À s’attaquer à ses courbes et ses plaines Il y pénètre quand même Doucement mais assurément Comme un prêtre pénètre un temple Il en sort heureux et soulagé Il voit plus clair Son œuvre est presque terminée Il ne lui reste à couler Que des éclairs dans les yeux Des châtaignes dans les cheveux Faire danser les ombres sur ses membres Verser le rouge de la colère sur ses lèvres Faire fleurir les camélias d’automne sur son sourire Le jaune…, le jaune de la peur Il préfère le garder dans son cœur Le miracle a fonctionné Il est en extase Les odeurs de la saison ont rempli l’espace Le jus de sa plume a donnée vie à la trame Sur la page Une admirable femme !