Aujourd'hui l'on frappe à la porte Je ne réponds pas Je sens que l'on m'en veut Je ne réponds pas
Des personnes parlent dans le hall Je ne bouge pas Elles crient, chuchotent Je ne bouge pas
Par le trou de la serrure, l'on me regarde Je ne parle pas Des rires frémissent sur le sol Je ne parle pas
Le téléphone sonne strident alarmant Je ne décroche pas Je ne sais pas qui je suis Je décroche
En demandant mon nom dans un souffle coupé et absurde L'homme à l'autre bout du fil semble me connaître Il m'appelle pour me demander si je suis bien là Au fond je ne sais pas
Il insiste J'ai peur Etes-vous là Oui, mais caché
Alors il triture le combiné de l'autre bout Et pénètre dans le fil enroué de ma ligne coupée Sort à genoux du 2 de mon clavier Et me cherche à l'affût d'une proie évadée
Mon appartement est retourné dans tous les sens Même ceux interdits ne sont pas respectés Il se gare sur la place que j'affectionne tant Le créneau d'une plaie ensanglante ma peine
On résonne à la porte; je tressaille Onde de choc parvenu à mon abdomen L'homme éberlué me retrouve en boule Comme un chien se lèchant le fondement
Quelqu'un regarde la scène par le trou de la serrure Il rit, s'esclaffe, rougit, jouit De me voir à terre, dominé par rien Que fait-il derrière cette porte
L'homme au téléphone maudit s'approche de mon enveloppe Il tend d'une main gantée son ombre d'espoir S'apprête à me saisir par l'épaule et jeter A peine m'a-t-il touché. Je suis poussière.