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Stéphane JARDIN

Les Vieilles Gens

On les dirait sans cesse agrippés par quelque force obscure, en la terre tapie. Les nuages, jadis chimères se cabrant, désormais revêtent pour eux la forme des songeries de l’Enfance, cette patrie qu’ils n’ont jamais été si près de rejoindre, à force de s’en éloigner.
Ce monde, vainement acharné à s’étourdir, comment ne les dépasserait-il pas constamment ? Longtemps, pourtant, ils se sont astreints de leur mieux au cours commun, qu’il faut bien suivre sous peine de finir échoué. De là, sans doute, l’impuissante indignation qui se lit sur le visage de certains, quand en eux pointe, aussi soudaine que vive, la conscience que pas le moindre indice de leur passage ne subsiste sur l’épiderme versicolore de cet organisme mouvant, décidément disgracieux, qu’il est convenu de désigner sous le nom de Société.
C’est au bord des bancs qu’ils s’autorisent parfois, timidement, un répit ; soumis à la loi naturelle et non moins inique qui les relègue et les pousse de côté, un peu plus chaque jour… Une connivence singulière s’établit entre eux et tout soleil déchu, enfin réduit à la taille de leur œil qui le reflète, frémissant, symbole d’une gloire passée que, le temps d’un intervalle suspendu, il leur semblerait presque avoir connue.