L'enfant sous les caféiers (Hommage au pays créole)
Par brûlante chaleur, quand vibrait la lumière Je gagnais volontiers l’épaisse caféière. Ses denses frondaisons, comme les hautes eaux D’une rivière en crue, explosaient dans les vaux, Submergeaient la colline. Au loin la Soufrière Ardente offrait aux dieux l’encens de sa prière.
Sous les dômes compacts mariant leurs rameaux Se creusait un réseau de couloirs, de boyaux Où régnait en plein jour une ombre sépulcrale. Comme lointain repère en ce profond dédale Je gardais toujours dans mon champ de vision La lisière au soleil de la plantation.
Les senteurs de l’humus me montaient à la tête Tandis que mes pieds nus fouillaient sa chair secrète, Molle et tiède ainsi que la chair d’un corps vivant. Aucun bruit ne filtrait, pas un souffle de vent Ne venait dissiper la fraîcheur relative De la derrière nuit, sous les feuilles captive.
Dans ce ventre accueillant j’avais l’impression De n’être plus qu’un frêle, anonyme embryon Sans besoins ni désirs, baignant dans l’euphorie. Le tourment de la soif me rendait à la vie, à mon humanité dont je sentais le poids Sans savoir cependant qu’elle était une croix.